Stabilimenta Rhodiorum militum - French version

based on the printed edition Paris 1493/1495 by Pierre Le Dru

© Jyri Hasecker, Hamburg / Jürgen Sarnowsky, Hamburg (2007/2022)

032-Reception 22


[d6r]

   Usaige
xxii. Comment les frères se privent de l’abit

Ceulx qui indignement causans leurs délitz et faultes portent le signal de la vraye croix en laquelle nostre saulveur Jhesucrist pour nostre rédemption a este mys doibvent méritement dicelluy signal estre privez. L’auctorité de priver de l’abit telz maulvais religieux est premise et donnée tant seulement au maistre ou à celuy qui tient son lieu et puissauce de faire. En la privation du quel habit ceste forme se garde et est usée :

Quant le frère de nostre religion pour délit ou crime commis incourt la peine de privation de l’abit le maistre ou son lieutenant à qui l’auctorité de la privation de l’abit appartient doibt adviser le conseil ordinaire du crime et délit et sur ce avoir déliberation dudit conseil. Après par meure ordination et détermination diceluy conseil ordinaire soit parvenu à la preuve du délit et soyent faictes et recevez les infor-[d6v]mations et tesmoigns selon la forme des establissemens et usances. Lesquelles choses faictes – se se doivra procéder selon l’exigence du délit contre l’accusé à privation de l’abit – adoncques le maistre ou son lieutenant comme dit est fait la plaincte en l’assemblée générale. Laquelle assemblée pour ce faire soit congregée au son de campane selon la manière acoustumée, en laquelle le maistre ou son lieutenant propose le crime de l’accusé et de tel délit et mal fait en sa propre forme ou soubz couleur de dommaige commis plus d’un marc d’argent pour couvrir l’atrocité du crime et eviter maulvaiz exemple face la plainte présent l’accusé et oyant, lequel à lassemblée soit mené par le maistre escuyer soubz bonne garde. La plaincte faicte le maistre ou son lieutenant la présidant donne esgard des baillifz contre l’accusé, lequel esgard doye juger selon Dieu et dictamen de droicte raison et establissemens et louables coustumes de la religion veuez les informations et preuvez ou confession du délit. Et incontinent le maistre ou son lieutenant donne le chief d’esgard et depute son procureur, preudomme et religieux, lequel procureur doit comparoir devant l’esgard et faire selon l’exigence du cas. Ce comply le chief et baillifz d’esgard s’en vont à part, devant lesquelz le procureur du maistre d’une part et l’accusé d’autre se présentent. Lequel procureur demande que l’accusé soit condempné à privation de l’abit selon la gravité du délit. L’accusé a puissance de respondre et de soy deffendre, lequel ou confesse le délit ou le nye. S’il le confesse et humblement demande miséricorde, adoncques l’esgard va au maistre et à l’assemblée et demande trois fois pardon pour l’accusé. Se le maistre pardonnera en vigueur des establissemens et non aultrement ne se procède plus avant. Mais se le maistre perséverant demande que soit faicte justice, adoncques l’esgard s’en va en lieu séparé. Et si l’accusé nyera le crime, adoncques les tesmoignances, preuvez et informations seront produitez. Et en ceste manière l’accusé par propre con-[d7r]fession ou tesmoings ou preuves legittimes convaincu et attaint du cas l’esgard donnera sentence et condempne l’accusé à privation de l’habit.

Laquelle sentence donnée l’esgard appelle le procureur du maistre et luy notifie la délibération, et ledit procureur dit à l’accusé que doye suyvir l’esgard. Lequel doit comparoir devant le maistre ou lieutenant et l’assemblée. Et l’accusé avecques lacrimeuse voir demande miséricorde. En telle manière l’esgard demande humblement pardon pour le delinquent atainct du crime. Se le maistre ou lieutenant perséverant commandera que soit donnée sentence, après le tiers commandement le chief et baillifz de l’esgard manifestement présent l’accusé pronuncent la sentence de privation de l’abit et condampnent le convaincu du crime. Quant la sentence est donnée le condempné lacrimeux à deux genoulz constitué devant le maistre persévéramment demande miséricorde. Et le maistre escuyer est prez du coste condempné attendant les commandemens du maistre ou de son lieutenant qui adoncques adresse ses parolles au condempné et pronunce la privation en ceste forme :

« Considéré que par tes desmérites et délitz tu tes fait indigne du signe de la vraye croix et de l’abit de nostre ordre à la proffession de laquelle as este receu – induit pour lors pour tes bonnes meurs – pourtant nous en ensuyvant les establissemans et usances de nostre religion, à louange des bons, terreur et craincte de maulvais, et affin que soit exemple aux aultres, nous te privons de l’habit de nostre ordre et te levons et séparons de la noble compaignie de noz frères, et comme membre et suppost pourry et puant te gectons hors ». Ces choses dittes(a) le maistre escuyer par commandement du maistre ou de son liutenenat lieve l’abit en la manière qui s’ensuit. Au premier commandement mect tant seulement la main au manteau du condempnè, au second desnoue les becqs du manteau et les giete devant, au tiers deslye le las et cordes du coul et lieve l’abit des espaules disant par l’auctorité du souverain : « Je te lieve le laz de servitude suave de Nostre Seigneur et l’abit de nostre ordre, du quel [d7v] tu tes rendu indigne ». Ces choses complyes, par commandement du maistre, ledit maistre escuyer mect le condempné en prison pour faire l’exequution selon ses desmerites.

Et se l’accusé sera absent premièrement cité ou selon la forme des establissemens contumace ou(b) ne se puist prendre, en son absence comme se présent fust – ou se le dit sera manifest et expressement contre la forme des establissemens perpetré et notoire crime pour lequel l’accusé encoure la privation de l’abit – adoncques non comparant l’accusé personellement est procédé toutesfoys, se constera du délit par legittimes preuvez, en la manière et forme dessus declarée. Et adoncques le contumace accusé par l’esgard est condempné et par le maistre ou lieutenant privé de l’abit. Et en lieu du condempné absent le manteau est constitué et mis au lieu. Et après le tiers commandement le maistre escuyer en confusion de l’absent le lieve.


(b) deest.
(a) It followsque.

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